Historiens
Joseph Fouché par Stefan Zweig
Cette biographie de Joseph Fouché, écrite par l'écrivain autrichien Stefan Zweig à la fin des années 1920, fait référence à l'ouvrage de base de Louis Madelin particulièrement bien documenté, qu'il qualifie de monumental.
Joseph Fouché, dit Fouché de Nantes, duc d'Otrante, comte Fouché, homme politique français né le 21 mai 1759 au Pellerin près de Nantes et mort le 26 décembre 1820 à Trieste, a toujours fasciné historiens et écrivains par sa longévité dans une période particulièrement troublée de l'histoire de France et de l'Europe où bien peu d'hommes ont survécu aux purges qui se sont succédé. Stefan Zweig ne faillit pas à la règle et est tour à tour émerveillé par l'attitude de marbre que gardera le plus souvent Fouché devant ses déboires et les avanies que lui a fait subir Napoléon Ier et épouvanté par la rouerie dont il fait souvent preuve, en bon élève de Machiavel.
Joseph Fouché, miniature sur ivoire par Jean-Baptiste Sambat
1- Présentation générale
Stefan weig
Stefan Zweig présente Joseph Fouché comme un homme politique dont les multiples talents n'ont jamais été reconnus, ni par ses contemporains, ni par la postérité. Il a connu de nombreux qualificatifs assez infamants allant de traitre, misérable intrigant, reptile, âme de basse police, jusqu'à mitrailleur de Lyon 1. Seul Balzac nous dit-il, « a vu de la grandeur dans cette figure originale » et dans son roman Une ténébreuse affaire, il consacre à cet « esprit sombre, profond, extraordinaire » une page entière, le décrivant comme « un singulier génie qui frappa Napoléon d'une sorte de terreur » dont le caractère « se forma dans les tempêtes. »
Il n'est pas donné à tout un chacun d'être régicide, pilleur d'églises à Nantes et à Lyon, de publier le premier manifeste communiste en 1793 puis de se lier avec Gracchus Babœuf 2 pour ensuite devenir duc d'Otrante et servir Louis XVIII et la Restauration. Aussi Stefan Zweig précise-t-il que la personnalité de Fouché « ne répond pas aux désirs évidents de notre époque... qui aime des vies héroïques » ce que son époque ne lui offre pas.
Parmi les biographies parues sur Joseph Fouché, outre celle de Louis Madelin, trois paraissent particulièrement intéressantes :
- Stefan Zweig, l'écrivain autrichien qui aborde sa biographie d'abord avec un regard d'écrivain;
- Deux biographies beaucoup plus récentes que les ouvrages de Louis Madelin et de Stefan Zweig, qui ont le mérite d'être écrites par de grands historiens français contemporains, André Castelot et Jean Tulard, qui apportent à leurs travaux des documents inédits comme les Mémoires de Fouché, délaissées car considérées longtemps comme apocryphes et provenant d'archives comme celles de la maison Charavay ou celles de la librairie Henri Saffroy.
2- Résumé et contenu
21- De la Révolution à l'Empire
Ce qui passionne Stefan Zweig, c'est l'homme Fouché, cet homme qui semble surfer sur les événements, toucher le fond pour mieux rebondir. Ce qui le fascine, c'est cet animal politique qui pressent, qui sent les évolutions et évite de se compromettre. Tâche quasiment impossible qui lui fera faire néanmoins quelques faux pas. Stefan Zweig qui s'est posé beaucoup de questions sur son époque et que le désespoir conduira au suicide, a tracé des liens entre l'époque révolutionnaire et l'époque où il écrit ce livre, marquée par la montée du fascisme.
Indéniablement, Stefan Sweig est attiré par cet homme. À plusieurs reprises, Fouché s'est cru perdu pour la politique, sans ressources, abandonné par tous, sans avenir. Il portera toujours, même après sa fabuleuse réussite sous l'Empire, les stigmates de son passé. Après sa mission à Lyon pendant la Terreur, il sera surnommé le mitrailleur de Lyon, il sera régicide, ce que la Restauration ne saurait lui pardonner, sa tiédeur à défendre Bonaparte après la fausse nouvelle de la défaite de Marengo, ce que le caractère ombrageux et vindicatif du futur empereur ne saurait également lui pardonner. Chaque période de sa vie contient ainsi des épisodes qui lui seront reprochés, qu'il portera comme une croix et en feront constamment un homme seul. Ce sont ses multiples facettes qui intéressent Stefan Zweig : virer à 180 degrés quand la nécessité s'en fait sentir, passant en un tournemain du Marais centriste à l'Extrême gauche montagnarde 3 pour servir ensuite le Consulat et l'Empire.
Paradoxalement, il gardera toujours entre lui et le pouvoir en place une distance qui fera qu'il ne se liera à aucun parti, aucune faction, aucun homme et refusera cette fidélité de laquais que l'empereur attendait de lui. « Napoléon n'aime pas Fouché et Fouché n'aime pas Napoléon, » écrit Stefan Zweig. Amitié, complicité impossibles car très certainement, ils n'aiment qu'eux-mêmes. Ils sont aussi très différents, au physique comme au mental : autant Napoléon est emporté par son tempérament corse et atrabilaire, autant Fouché sait faire preuve d'un sang-froid remarquable. On dit de lui qu'il est un animal à sang froid.
Fouché possède une puissance de travail phénoménale. Il sait tout sur tous, tout sur les turpitudes de la famille impériale, sur l'empereur aussi qui ne pouvait rien lui cacher de sa vie sentimentale avec Joséphine 4 ou avec ses maîtresses. Cette faculté « procure à Fouché cette puissance unique sur les hommes que Balzac admirait tant. »
22- De l'Empire à la Restauration
Fouché reste néanmoins un fonctionnaire arriviste, « jamais même quand il deviendra duc d'Otrante, malgré son uniforme étincelant d'or, Joseph Fouché ne sera réellement un aristocrate. » Coup de théâtre à Paris : « pendant que Napoléon guerroie en Espagne, Fouché et Talleyrand se réconcilient de façon spectaculaire. ». Violente réaction de Napoléon qui rentre en trombe à Paris, pourfend ces eux comploteurs et sanctionne Talleyrand. Mais contre Fouché, rien ; les courtisans en sont pour leurs frais. De plus, voilà Fouché débarrassé de son plus dangereux rival. Et Stefan Zweig de conclure : « Seul un homme demeure toujours à la même place, sous tous les maîtres et sous tous les régimes : Joseph Fouché. »
Talleyrand La côte d'Otrante
Mieux, en 1809, il contre une tentative d'invasion anglaise et sauve l'Empire. Dans cette affaire, « il a été le seul à faire voir qu'il est capable non seulement d'obéir, mais encore de commander. ». C'est ainsi que l'ancien communiste et clerc défroqué devint duc d'Otrante. Mais après un tel succès, il voit trop grand, et négocie en secret avec les Anglais ; il est découvert et renvoyé. Il va tenter de se venger en subtilisant des documents importants et en ridiculisant son successeur Savary 5, duc de Rovigo, « une baderne aux doigts gourds » selon Stefan Zweig.
Napoléon ne lui pardonnera jamais cette perfidie. Pour l'instant il le pourchasse et Fouché s'enfuit subitement en Italie, cherchant désespérément un asile. Cette fois, l'homme aux nerfs d'acier a craqué, persuadé que la colère de l'empereur va être terrible. Mais ce dernier, à l'heure où l'Empire vacille, a d'autres soucis. Il rappelle Fouché mais c'est pour mieux le tenir en laisse et lui donner des missions impossibles.
Fouché rentre à Paris à bride abattue mais trop tard : Louis XVIII est déjà installé.
23- Des Cent-Jours à la Restauration
Waterloo, la bataille
Comme d'habitude, quand est évincé du pouvoir, il attend son heure, « il ne bouge pas et souffle comme un lutteur avant le combat. ». Il refuse les offres alléchantes de la Restauration qui préfère le faire arrêter. Mais l'opération échoue et Fouché s'enfuit de son domicile par le jardin, à l'aide d'une échelle. Tout Paris en glose, en cette période troublée, on tombe dans le vaudeville. Conclusion de Napoléon en route pour les Tuileries 6 : « Il est décidément plus malin qu'eux tous. ».
Il est tellement malin — et dangereux — que l'empereur, à peine réinstallé, le nomme de nouveau ministre de la police pendant les Cent-Jours 7. Remarque de Stefan Zweig : « C'est Prothée, dieu des métamorphoses » et Fouché aurait pu lui rétorquer ces mots qu'il dira plus tard : « Ce n'est pas moi qui ait trahi Napoléon, c'est Waterloo. »
Entre Napoléon et Fouché le vaudeville continue : l'empereur fait espionner son ministre, en pourparlers avec Metternich 8 qui, à son tour, fait espionner Napoléon et évite le piège qu'on lui tendait. Fouché rit intérieurement et Napoléon pique une terrible colère. Mais les choses se précipitent, l'Empire est balayé à Waterloo et à force de persévérance et de manipulations, Fouché est enfin propulsé au pouvoir suprême, recevant les hommages de toute l'Europe. Maintenant, note non sans malice Stefan Zweig, « le ministère, le Sénat et la représentation populaire sont malléables comme de la cire dans sa main de maître. »
Pratiquement seul contre tous, il va tisser ses fils pour favoriser la royauté et parvenir à la rétablir moyennant un poste ministériel. Incorrigible Fouché qui espère que les royalistes assoiffés de pouvoir oublieront — comme lui-même oublie si facilement son passé — et pourront côtoyer le jacobin et le régicide. Cette fois, il se trompe lourdement. Stefan Zweig décrit ce qui sera pour lui le début de la fin : ministre temporaire, ambassadeur éphémère à Dresde puis banni. Exilé de France, il va errer pendant trois ans de Prague à Linz puis s'éteindre à Trieste en 1820.
À travers la fin de Fouché, Stefan Zweig dépeint l'inconséquence et la mesquinerie d'hommes qui voudraient faire oublier leur petitesse, leurs reniements ou en profitent pour accabler cet homme déchu. Reste ce trait de Chateaubriand à propos de Fouché et Talleyrand rencontrant Louis XVIII : « Le vice appuyé sur le crime. »
3- Références
- Voir Baron Raverat, Lyon sous la révolution, 1883, réédité sous le titre Le sang de la guillotine, dans Lyon, vingt siècles de chroniques surprenantes, Jacques Borgé et Nicolas Viasnoff, Éditions Balland, 1982
- Voir Jean Bruhat, Gracchus Babeuf et les Égaux ou 'le premier parti communiste agissant', Librairie académique Perrin, 1978
- Voir Jeanne Grall, Girondins et Montagnards : les dessous d'une insurrection en 1793, Éditions Ouest-France, Rennes, 1989, 213 pages,(ISBN 2-7373-0243-9)
- Voir André Castelot, Joséphine, Librairie Académique Perrin, 1964
- Voir Thierry Lentz, Savary, le séide de Napoléon, Éditions Fayard, 2001, 556 pages, (ISBN 2213611270)
- Voir Antoine Boulant, Les Tuileries, palais de la Révolution (1789-1799), 1989.
- Voir Jean Tulard, Les Cent-Jours, Éditions Fayard, 2001
- Voir Charles Zorgbibe, Metternich, le séducteur diplomate, Éditions de Fallois, 09/2009, (ISBN 2877066908)
4- Bibliographie
- Stefan Zweig, Fouché, biographie, traduit de l'allemand par Alzir Hella et Olivier Bournac, Édition originale 1929, Édition française Bernard Grasset, réédition Grasset, Les cahiers rouges, Paris, 2003, (ISBN 2246168147)
- Le Livre de Poche historique no 525-526, 1973
- Jean Tulard, Éditions Fayard, 1998 : Joseph Fouché (Tulard)
- André Castelot, Librairie Perrin, 1990 : Fouché, le double jeu.
- André Castelot, 3 autres ouvrages sur cette période : Bonaparte, Napoléon et Talleyrand, Éditions Perrin
- Louis Madelin, Fouché, Paris, 1901, 2 volumes, réédition Éditions Plon, 1955
- Claude Manceron, Les hommes de la liberté, 5 volumes
5- Autres sources
Émile Verhaeren: sa vie, son œuvre 1910 | Tolstoï 1928 | Marie-Antoinette 1933 | Marie Stuart 1935 | Romain Rolland : sa vie, son œuvre 1929 |
<><> CJB Frachet - Fouché Castelot- Feyzin - 27/09/2009 - <><> •• © • cjb • © •• <><>
André Castelot Fouché le double jeu
Fouché, le double jeu est une biographie de Joseph Fouché par André Castelot membre de l'Institut de France.
Fouché a vécu à une période qu'André Castelot connaît bien puisqu'il lui a consacré de nombreux ouvrages, aussi bien sur la famille royale, sur les révolutionnaires que sur la famille impériale.
Joseph Fouché, miniature sur ivoire, Jean-Baptiste Sambat
1- Présentation générale
Depuis les biographies de références sur Fouché, celles de Louis Madelin et de Stefan Sweig, celle d'André Castelot se base sur une analyse critique des Mémoires de Fouché et sur des documents inédits provenant des archives nationales et de celles des Affaires étrangères. Ces nouvelles pièces à verser au dossier permettent de mieux suivre sa démarche sinueuse à travers toutes les chausse-trappes de l'époque.
Cette biographie de Joseph Fouché écrite par l’historien André Castelot apporte des informations inédites dont on a dit qu'il « avait renouvelé la connaissance de Joseph Fouché. »
- Elle intègre les Mémoires du duc d’Otrante qu’on a pendant longtemps jugés apocryphes qui reposent pourtant sur des éléments probants 1.
- Elle repose sur des « documents souvent inédits provenant des Archives nationales et des Affaires étrangères. »
- Elle utilise la documentation rassemblée par Alain Decaux pour écrire une biographie de Fouché qu’il ne put écrire faute de temps et qu’il mit à la disposition de son ami André Castelot.
André Castelot
2- Portrait de l'homme
Évoquant Joseph Fouché, Napoléon eut ce jugement flatteur sur son ministre : « Le seul homme d’état que j’ai eu 2. » Beau compliment d’un homme peu coutumier d’en faire. La plupart de ses contemporains le décrivent comme froid et calculateur, un homme insaisissable dont il faut se méfier 3, un homme qui sert les régimes avec toujours le même zèle 4. Cette fâcheuse réputation lui jouera des tours plusieurs fois, se sera évincé du pouvoir et n’accèdera jamais au ministère des Affaires étrangères 5.
Pourtant, il a été un adolescent sage et malingre qui poursuivit sérieusement des études qui le mèneront à l'Oratoire où il enseignera la physique. Pour cette raison, ses adversaires à la Convention le traiteront de 'prêtre défroqué'. Pourtant, lors de son séjour à Arras, beaucoup des gens qui l’ont connu lui reconnaissent de l’entregent, il est à l’aise en société, se liant d’amitié avec Robespierre et sa sœur Charlotte que, si l’on en croit ses propos, il faillit épouser. Il est un père de famille exemplaire, fort amoureux de sa première femme Bonne-Jeanne, une rouquine passant pourtant pour être fort laide, aimant beaucoup ses enfants dont il s’occupait assidûment. C’est un portrait contrasté que donne André Castelot, assez différent du mythe de l’homme sans qualité, espèce de Machiavel dont il a laissé l’image.
La toilette de Fouché est « plus que sommaire » estime Barras. Ses seuls plaisirs, outre la vie de famille qu’il cultive avec application 6, tournent autour de l’équitation le matin et la musique en soirée. Quand ce bourreau de travail se sent surmené, il mande un joueur de flûte du Théâtre de Vaudeville et, « à mesure qu’il joue, il sent véritablement ses nerfs se détendre » note Castelot. Madame de Chastenay ajoutera : « Son impassibilité ne se dément jamais ».
Il a aussi beaucoup d’esprit, ce que Napoléon ne goûtera pas forcément. Un jour de 1809, que Napoléon lui reproche son passé régicide, Fouché lui répond : « Oui sire, c’est le premier service que j’ai eu le plaisir de rendre à votre majesté ». Madame de Chastenay, sa bonne amie le décrit ainsi dans ses Mémoires : « Fouché était assez grand, maigre, d’une pâleur qui venait surtout de ce que, dans sa jeunesse, ses cheveux avaient été d’un blond très fade. Les yeux, fort petits, fort rapprochés, très rouges, étaient cependant assez perçants et toute cette figure ne manquait ni de physionomie, ni à l’occasion d’une certaine jeunesse. »
3- Contenu et résumé
31- Fouché conventionnel
De l’époque révolutionnaire, Joseph Fouché aimait peu parler, il le résumait par cette formule : « Il fallut plus ou moins hurler avec les loups. » Formule lapidaire qui cache un passé de régicide et de « mitrailleur » qui le poursuivra toujours 7, qui rejoint l’opinion de Jean Tulard : c’est d’abord un opportuniste, une bête politique qui analyse les événements et flaire les bonnes solutions pour se retrouver dans le camp des vainqueurs. Comme représentant en mission de la Convention, il va devenir redoutable : quand il quitte Nevers, il écrit à paris : « Dans 15 jours, il n’y aura ni or ni argent (à prendre) dans les départements de l’Allier et de la Nièvre. » 8
Son collègue Collot d'Herbois
À travers son action, il vise deux bus : la "déchristianisation" des départements où il est en mission 9, luter contre les riches, les 'accapareurs' 10. Le 10 novembre 1793, Joseph Fouché est à Lyon avec Collot d’Herbois avec mission de venger la mort de Chalier note 1 et de détruire la ville rebelle 11 . C’est le temps des mitraillages, « soyons terribles, écrit-il au Comité de salut public, pour ne pas craindre de devenir faibles et cruels 12. » Également parfait adepte du double jeu comme le rappelle le titre de cette biographie, il tente de se dédouaner, se retourne contre la Convention 13. Croyant à une évolution de la Convention, il réagit trop vite, dissout les Comités révolutionnaires et est rappelé à Paris.
Il décide de rencontrer Robespierre pour se disculper mais l’entrevue est un fiasco : entre eux, c’est désormais la guerre 14. Fouché tremble désormais pour son avenir mais la tentative d’assassinat contre son confrère Collot d’Herbois le tire d’affaire. Robespierre réagit, le met en accusation et le fait exclure du Club des Jacobins. Fouché n’ose plus dormir chez lui 15. Il n’en poursuit pas moins inlassablement son travail de sape sans se mettre en avant 16 et sera l’un des principaux artisans de la chute de Robespierre le 9 thermidor (28 juillet 1794) 17. Toute cette activité sera vaine puisqu’il est rejeté par les nouveaux maîtres, les Thermidoriens. Première disgrâce qui finira quand Barras parviendra à le faire nommer ministre plénipotentiaire d’abord à Milan (république transalpine) puis en Hollande (république batave) 18.
32- Fouché sous le Directoire
En 1797, la situation est si confuse que le Directoire cherche un ministre de la police assez compétent pour rétablir l’ordre. D’après André Castelot, c’est Talleyrand qui a suggéré la solution Fouché note 2. Sitôt nommé, Fouché se met à la tâche, s’occupe de ce qu’il reste de royalistes et musèle La Montagne en fermant le club des Jacobins, « un parfait chef d’œuvre du double jeu » conclut André Castelot. Les caisses sont vides, il les remplit, en monnayant les services de police 19.
Mais il est évident que le Directoire est en sursis et Fouché va mettre ses dons d’organisation, son esprit de décision au service de Bonaparte qui rentre d’Égypte. Avec le préfet de police Réal 20, s’appuyant sur Barras et surtout sur Sieyès, les principaux directeurs, il va mettre sa science et sa police au service à la disposition de Bonaparte 21. C’est lui qui rédige la note qui informe les citoyens des changements politiques note 3.
Le 11 novembre 1799 (20 brumaire an VIII), Bonaparte, Sieyès et Roger Ducos se réunissent au palais du Luxembourg : le Consulat est né. Fouché –'la perdrix rouge' l’appelle-t-on parfois à cause du liseré rouge qui borde ses yeux- est bien sûr reconduit dans ses fonctions. Il définit sa doctrine 22 et commence à mettre en place un grand réseau d’informateurs, une toile d’araignée pour tout savoir sur tous 23.
Quand survient la fausse nouvelle de la défaite de Marengo, Fouché garde la tête froide, calme le jeu et Napoléon lui sera gré de sa conduite en cette occasion 24. « Ma reconnaissance pour tous les services que vous avez rendus à la république, lui dit Napoléon, a encore été augmentée par la découverte des 'comités anglais' 25. L’attentat manqué de la rue Saint-Nicaise lui donne l’occasion de confondre ses détracteurs et de résoudre le plus dangereux des complots royalistes 26.
Mais Fouché sort de son rôle, se mêle de politique et en 1802, il va marquer ses réticences en deux occasions importantes, s’opposant toujours à sa manière par des contacts discrets avec le Sénat, à la signature du Concordat puis essayant d’éviter que Bonaparte ne devienne Consul à vie 27. Mais le 20 juillet 1802, un plébiscite ratifie cette nomination 28. Bonaparte, toujours aussi vindicatif et poussé par ses frères Joseph et Lucien, trouve un subterfuge pour se débarrasser de Fouché : il supprime son ministère. En contrepartie, il est nommé sénateur et reçoit la sénatorerie d’Aix-en-Provence, qui rapporte au moins 20.000 francs par an.
33- Son Excellence, monsieur le Sénateur
Pendant sa disgrâce, Fouché est un sénateur assidu, un homme toujours présent dans sa famille 29 dans le château de Ferrières-en-Brie 30 qu’il vient d’acquérir et dont il agrandira largement les dépendances. Il y reçoit ses amis, d’anciens conventionnels comme Daunou et Thibaudeau ou sa grande amie madame de Chastenay.
Mais il garde un œil sur les affaires, a des contacts avec son réseau d’informateurs et Bonaparte lui demande même d’aller jouer les médiateurs en Suisse. Il devient très influent au Sénat et sur les instances de Bonaparte, il va réussir à convaincre le général Moreau, impliqué dans un nouveau complot royaliste de Cadoudal 31, de s’exiler aux États-Unis. Sans fonction officielle, il joue un rôle capital dans le passage à l’Empire puis, comme membre de la « commission des dix », prépare le texte qui instaure le Premier Empire 32. Le 10 juillet 1804 -21 messidor an XII- il assiste au triomphe de Napoléon chez Augereau au château de La Houssaye. Après une longue entrevue avec l’Empereur, il est réintégré dans ses fonctions.
34- Monsieur de duc d'Otrante
Joseph Fouché reprend ses fonctions de ministre de la police dont il disait : « Pour savoir ce qui se passe, il faut bien mettre un peu son nez partout ». Mais ses fonctions vont bien au-delà : il dirige la gendarmerie, les prisons, s’occupe de la censure, des émigrés, des correspondances avec l’étranger… une espèce de super ministère.
La grande affaire du moment, qui est taboue et qu’il ne faut surtout pas évoquer, c’est la stérilité de Joséphine 33 et l’avenir de la dynastie. Fouché qui craint le retour des Bourbons va pousser l’empereur à trouver une femme qui l’ancre dans les dynasties régnantes et lui donne un héritier 34. En 1807, il s’adresse directement à Napoléon, « je lui représentais la nécessité de dissoudre son mariage », de se remarier pour « donner un héritier au trône ». À l’automne, il va encore plus loin, envoyant à Joséphine une lettre explicite où il l’incite à faire passer les intérêts de l’État avant les siens… Lettre que Joséphine fait lire à un Napoléon content sur le fond, mais irrité par le toupet de son ministre 35. Excès de zèle qui sert bien Napoléon mais qui un jour lui sera fatal 36.
Pendant que l’Empereur est à Bayonne, préparant l’invasion de l’Espagne, Malet, un obscur général, concocte un projet de complot quelque peu fumeux et vite éventé mais le préfet de police veut en tirer tous les bénéfices et l’on assiste à un chassé-croisé entre Dubois et Fouché qui irrite Napoléon, même si Fouché en sort vainqueur. N’empêche : le complot reposait sur un empereur absent de Paris et sans héritier.
En 1808, Fouché va annihiler les dernières velléités royalistes : leurs groupes seront démantelés, leurs chefs La Haye Saint-Clair, Prégent, Armand de Chateaubriand (le neveu de l’écrivain) 37 exécutés. Napoléon est aux anges et félicite son ministre qui atteint son apogée.
Talleyrand 38 et Fouché se serrant la main, discutant sereinement : ce qu’à Paris on croyait impossible, s’accomplit. Ils sont tous deux inquiets et envisagent les possibles successeurs. Le 23 janvier 1809, Napoléon revient d’Espagne à toute vitesse pour tirer les oreilles aux deux galopins qui ont osé tant d’impudences. Crime de lèse-majesté : c’est Talleyrand qui fait les frais de la disgrâce. Le 12 avril 1809, la guerre reprend avec l’Autriche. Les Anglais profitent de la défaite d’Essling pour débarquer dans l’estuaire de l’Escaut. Fouché –ministre de l’intérieur pas intérim- réagit avec énergie, rameute les troupes qui, sous le commandement de Bernadotte 39, rejettent les Anglais. Napoléon salue son courage politique –dont ont tant manqué les autres ministres- et le nomme duc d’Otrante avec 60.000 livres de rentes annuelles 40.
La conjonction de la tentative d’assassinat de Staps à Vienne et l’annonce par Marie Walewska 41 de sa grossesse convainquent Napoléon d’assurer sa succession avec une princesse d’une maison royale. L’affaire sera promptement menée et très vite, l’Empereur va épouser Marie-Louise d'Autriche. Ceci ajouté à l’exécution du duc d’Enghien 42 tend à enraciner l’Empire et à écarter le retour des Bourbons. Fouché en est soulagé.
35- La fin de l'Empire
Une nouvelle fois, Fouché va être victime de lui-même, de cette fatuité dit André Castelot de se croire supérieur aux autres. Sans en informer l’Empereur, il va se mettre en tête de négocier une paix séparée avec l’Angleterre, prenant des contacts, se compromettant par des écrits. Quand l’Empereur l’apprendra –pare son frère Louis- ce sera l’explosion. Se déroule alors une espèce de vaudeville où Fouché ridiculise Savary son successeur en détruisant une partie des archives du ministère, en refusant de rendre à Napoléon des documents importants. L’Empereur va vraiment se fâcher et Fouché, effrayé de sa folle impudence, fuit en Italie, demande l’intercession d’Élisa Bonaparte 43 pour apaiser le courroux de son frère.
Finalement, Fouché restituera les documents en litige et pourra résider dans sa sénatorerie d’Aix-en-Provence. C’est au cours d’un voyage à Marseille qu’il rencontre celle qui deviendra sa seconde épouse Ernestine de Castellane-Majastre. En septembre 1811, il est autorisé à regagner son château de Ferrières-en-Brie. Il revoit Napoléon et le met en garde sur les dangers d’une guerre contre la Russie 44. Le 8 octobre 1812, il perd sa chère Bonne-Jeanne, compagne des bons comme des mauvais jours, qu’il a vraiment aimée 45. Il a dû bien rire quand il apprit que pendant le second complot du général Malet 46, son successeur Savary avait été arrêté et emprisonné pendant plusieurs heures 47. Napoléon est à Dresde quand en mai 1813, il rappelle Fouché, ne voulant pas le laisser à Paris 48. Il l’envoie en mission à Naples auprès de Murat qui s’éloigne de son beau-frère et a pris de contacts avec les Autrichiens et les Anglais.
Fouché est nommé gouverneur général de l'Illyrie 49, passe par Prague pour tenter une dernière démarche diplomatique auprès de Metternich et s’installe dans la capitale Laibach 50 où il arrive le 29 juillet 1813. Mais la guerre reprend et malgré tout son flegme devant l’avance de l’ennemi, il se replie sur l’Italie pour s’établir à Bologne. Il repart bientôt pour Naples tancer Murat, toujours aussi dubitatif sur la conduite à tenir, utilise une « manière très personnelle d’interpréter les ordres de l’Empereur pour empêcher la trahison de Murat », comme écrit André Castelot 51.
Il espère gagner Paris avant la défaite annoncée mais après un crochet par Toulouse pour éviter les armées ennemies, il n’y arrive que le 8 avril 1814… une semaine plus tard, Talleyrand est dans la place. Il assiste donc au rétablissement des Bourbons à travers un projet de constitution élaboré par le Sénat note 4, intervient pour trouver un compromis entre les ultras et les tenants d’une monarchie constitutionnelle. Dans une lettre à Monsieur, comte d’Artois, futur Charles X, il a cette vision prémonitoire : « Napoléon sur ce rocher (l’île d’Elbe) serait pour l’Italie, pour la France, pour toute l’Europe ce que le Vésuve est à côté de Naples. » Avec son sens politique aigu, Fouché donne au roi de forts bons conseils, écrit par exemple à madame de Custine : « Pourquoi au lieu d’espérance vague, ne pas donner sur-le-champ aux émigrés tout ce qu’on peut leur rendre, vous les satisferiez et vous n’inquiéteriez personne ». Il pense bien rentrer en grâce mais l’intervention de la duchesse d’Angoulême, fille de Louis XVI, ruine ses espoirs. Rentré à Ferrières-en-Brie, il ne tient pas en place, multiplie correspondance et entrevues.
36- La parenthèse des Cent-Jours
Joseph Fouché déclarait plusieurs mois avant que le 5 mars 1815, Napoléon ne débarque à Golfe-Juan, que le succès d’une telle action « dépendrait du premier régiment qui serait envoyé au-devant de lui ». Préscience d’un homme dont I. de Saint-Elme disait : « On ne pouvait le pénétrer, il vous pénétrait toujours ». Son entregent, son autorité impressionnent aussi le comte d’Artois qui lui accorde un entretien à l’hôtel de la princesse de Vaudémont.
Mais Bourrienne, nouveau préfet de police, s’avise de le faire arrêter. Se déroule alors un nouveau vaudeville, mystifie les policiers venus l’arrêter, tombe littéralement dans les bras de sa voisine Hortense de Beauharnais qui l’aide à s’enfuir. Napoléon, de retour à Paris et apprenant 'l’évasion' de Fouché, s’exclamera : « Il est décidément plus malin qu’eux tous »… et pour la quatrième fois va le nommer préfet de police.
Fouché a bien senti la situation délicate dans laquelle se trouve l’Empereur 52, joue plus que jamais double jeu, prend des assurances auprès des Bourbons mais Napoléon n’est pas dupe et le fait surveiller 53. Napoléon s’en trouvera bien car c’est ainsi, par des négociations avec ses contacts chouans, que Fouché évitera qu’une révolte sanglante ne renaisse en Vendée 54. Dès l’annonce de la défaite de Waterloo, Fouché sait que l’Empire a vécu et qu’il faut agir pour l’avenir. Au Sénat, il va utiliser la même méthode qu’au 9 thermidor pour abattre Robespierre : aux Bonapartistes, il susurra d’accorder les pleins pouvoirs à Napoléon et devant les autres, il agite le spectre de la dictature.
Il tranquillise le chancelier Pasquier qui représente Louis XVIII, manœuvre les assemblées –le Sénat et la Chambre des pairs- et le 23 juin 1815, contre Carnot, il est élu président de la commission du gouvernement, autrement dit chef de l’exécutif. Les Assemblées se rallient à une solution Napoléon II mais Fouché sait à quoi s’en tenir sur les sentiments des Alliés 55.
Il peut être satisfait, son étoile est au zénith aussi bien auprès des royalistes 56 que des princes eux-mêmes 57. Tandis que les Alliés encerclent Paris, Fouché tire les ficelles pour ménager l’armée et que la royauté soit restaurée en douceur. Avec une pointe d’ironie, il dira : « Me voilà encore sur les flots et au milieu des tempêtes ». Tout se passa selon ses vœux et Louis XVIII fut obligé d’avaler quelques couleuvres où le duc d’Otrante n’était pas étranger :
- L’ordonnance de nomination de Fouché au ministère de la police 58. « Hors de Fouché, point de salut » constate monsieur de Vitrolles. - La nuit de Saint-Denis au cours de laquelle Fouché prêta serment introduit par Talleyrand, "cette vision d’enfer", « le vice appuyé sur le bras du crime, monsieur de Talleyrand soutenu par monsieur Fouché » écrira Chateaubriand dans Les mémoires d’outre-tombe note 5.
37- Dernière disgrâce et exil
Fouché semble être à sa place dans le nouveau régime. Si l’on regarde le chemin parcouru, l’itinéraire est extraordinaire note 6. Le baron de Vitrolles est tout étonné de deviser paisiblement chez Fouché dans un grand salon plein d’un monde bigarré venant de tous les régimes qui en 20 ans ont traversé la France 59. Mieux même, il fait avaler à Louis XVIII une nouvelle couleuvre en lui faisant signer son acte de mariage avec Gabrielle-Ernestine de Castellane, vieille famille française désargentée 60.
Il pensait avoir fait l’essentiel, le plus difficile. Erreur, lui qui savait si bien anticiper, prendre le pouls de l’opinion, ne pressent pas la fragilité de sa situation et le rôle des Ultras qui s’agitent après leur victoire aux élections. C’est finalement son vieil ennemi Talleyrand qui prend les devants pour sauver son ministère 61. Vain effort, puisqu’il sera rapidement remplacé par le duc de Richelieu 62.
Fouché est éloigné, nommé ambassadeur en Saxe où il retrouve Dresde. Mais les Ultras 63 vont se déchaîner et l’exclure de la loi d’amnistie, pis même, lui interdire le sol français. Il tente de sauver les apparences, espérant encore des jours meilleurs, même s’il accuse le coup 64. Son exil prend un tour d’errance quand il quitte Dresde pour Prague où il se brouille avec son ami le comte Thibaudeau dont le fils a noué une intrigue amoureuse avec la duchesse d’Otrante 65. Puis il passe par Carlsbad et s’établit à Linz, petite ville d’Autriche où il ne se plaît pas.
Metternich l’autorise à séjourner à Trieste au bord de l’Adriatique où il retrouve d’autres exilés, Jérôme Bonaparte le frère cadet de Napoléon, et sa sœur Élisa Bonaparte. Il semble qu’il accepte mieux son sort 66, commence volontiers les événements 67 mais sa santé s’est beaucoup détériorée.
Le 20 décembre 1820, il prend froid, contracte une pleurésie et mourra 5 jours plus tard. « Le sort d’un exilé, a-t-il dit en soupirant, est d’être un objet de contagion pour tous qui l’approchent ».
4- Bibliographie
- principales biographies d'André Castelot
- Philippe égalité, le prince rouge, Librairie Perrin, 1951, ouvrage couronné par l'Académie française
- Marie-Antoinette, Librairie Perrin, 1953, ouvrage couronné par l'Académie française
- Joséphine, Librairie Perrin, 1965, prix du Plaisir de lire
- L'aiglon, Napoléon II, Librairie Perrin, prix Richelieu en 1959 et prix des Mille lecteurs en 1967
- Bonaparte et Napoléon, Librairie Perrin, 1968
- Napoléon III (2 volumes), Librairie Perrin, 1974, prix des Ambassadeurs
- Maximilien et Charlotte, Librairie Perrin, 1978, prix du Cercle de l'Union
- Talleyrand ou le cynisme, Librairie Perrin, 1980
- Henri IV le passionné, Librairie Perrin, 1980
- Madame Du Barry, Librairie Perrin, 1989
- Fouché, le double jeu, Librairie Perrin, 1990
5- Autres biographies
- Stefan Zweig, Fouché, biographie, traduit de l'Allemand par Alzir Hella et Olivier Bournac, Édition française Bernard Grasset, Le Livre de Poche historique n° 525-526, 1973, Article détaillé : Joseph Fouché (Zweig).
- Jean Tulard Joseph Fouché, Fayard. 1998 : Joseph Fouché (Tulard)
- Louis Madelin Fouché, Librairie Plon 1955
- Julien Sapori L'exil et la mort de Joseph Fouché, Anovi, 2007
6- Mémoires et souvenirs
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7- Données connexes
- Joseph Valynseele, La descendance de Fouché : Princes et ducs du Premier Empire non maréchaux, leur famille et leur descendance, 1959
- Ernest d'Hauterive, Bulletin de la police secrète
- Aulard Le culte de la raison; recueil des actes du Comité de salut public
- Despatys, (d'après les Mémoires de Gaillard), Un ami de Fouché
- Albert Vandal, L'avènement de Bonaparte
- Louis Madelin et Lumbroso, Le Portefeuille de Fouché
8- Notes et références
- Notes
- Discours de Fouché : « Chalier, tu n’es plus ! Martyr de la liberté, les scélérats t’ont immolé. Chalier, Chalier, nous jurons sur ton image sacrée de venger ton supplice. Oui, le sang des aristos te servira d’encens !
- Selon Jean Tulard, ce serait plutôt Paul Barras qui aurait proposé la solution Fouché à ses collègues. [NDRL)
- « Citoyens, la République était menacée d'une dissolution prochaine.[...] Que les faibles se réssurent, ils sont avec les forts : que chacun suive avec sécurité le cours de ses affaires [...] Tous ceux qui pourront attenter à la sûreté publique ou particulière seront saisis et livrés à la justice. »
- Article 1er : « Le gouvernement français est monarchique et héréditaire de mâle en mâle par ordre de primogéniture. » et Article 2 : « Le peuple français appelle librement au trône de France Louis-Stanislas-Xavier de France, frère du dernier roi, et après lui les autres membres de la maison du roi dans l'ordre ancien. »
- C’était aussi oublier qu’il était allé humblement solliciter le soutien de Fouché pour tenter de sauver son cousin Armand, impliqué dans un complot royaliste. (NDLR)
- Louis Madelin : « On pense dans quels sentiments d’ivresse, ou tout au moins d'orgueilleuse satisfaction, cet homme sorti des Tuileries pour gagner l'hôtel de la Police, ces mêmes Tuileries où il était venu en 1794 défendre sa tête devant le Comité de salut public, où tant d'années il avait conféré avec Bonaparte, Premier consul et Empereur, où le 20 mars, il avait reparu et d'où il sortait ce soit-là, ministre de Louis XVIII... »
- Références
- Louis Madelin lui-même, premier grand biographe de Fouché, est revenu sur son jugement de contester la véracité des Mémoires
- Confidence rapportée par Cambacérès
- Barras écrivit dans ses Mémoires : « Il réunissait la défiance unanime du Directoire. » Napoléon, à la fin de l’Empire en 1813-1814, voulant l’éloigner de Paris, l’enverra en mission dans les Provinces Illyriennes puis auprès de Murat à Naples
- Joseph Fouché a successivement servi six régimes de 1793 à 1815
- Par exemple, son éviction au début du Directoire ou ses deux disgrâces sous l’Empire
- Il dit de sa femme Bonne-Jeanne qu’elle est « le modèle et l’exemple de son sexe »
- Un passé qui lui voudra son ultime disgrâce sous la Restauration
- Voir lettres de Joseph Fouché : archives de la maison Charavay
- Voir le décret Fouché du 9 octobre 1793
- Voir sa lettre aux électeurs nantais dans laquelle, il écrit : « On voit autour de nous celui qui a du superflu… »
- « Nous devons vous le dire, citoyens collègues, l’indulgence est une faiblesse dangereuse. » (Lettre de Fouché à la Convention)
- Il conclura de cette façon : « Oui, nous osons l’avouer, nous faisons répandre beaucoup de sang impur, mais c’est par humanité et par devoir ».
- Il répond à son ancien confrère de l’Oratoire le père Nollet : «Les agents de la révolution sont des fous ou des misérables. Je suis leur esclave plus que leur maître. »
- « A dater de ce jour Fouché fut l’ennemi le plus irréconciliable de mon frère et se réunit à la faction qui conspirait sa perte » écrira Charlotte Robespierre qui assista à l’entrevue
- « J’appelle ici Fouché en jugement » s’écrit Robespierre devant les membres du Club des Jacobins
- « Fouché, écrit Barras dans ses Mémoires, tripotait, intriguait, machinait en dessous de fort bon cœur et avec activité. »
- Gérard Walter, ‘’La conspiration de 9 thermidor’’
- « Sus le gouvernement de la république, écrit Fouché, je fus sinon proscrit, du moins en disgrâce complète… partageant cette inconcevable défaveur pendant près de 3 ans avec un grand nombre de mes anciens collègues »
- Fouché écrit : « J’ai mis bientôt de l’argent dans ma caisse en rendant le vice, inhérent à cette grande ville, tributaires de la sûreté de l’État ».
- Voir Louis Bigard, Le comte Réal
- « Je viens de faire fermer les barrières et j’ai arrêté les départs des courriers et des diligences » annonce-t-il à Bonaparte le 18 brumaire »
- « Il faut abandonner les errements de cette police d’attaque qui, sans cesse inquiète et turbulente, menace sans garantir et tourmente sans protéger »
- Sur les méthodes de Fouché, voir Lenôtre, « L’affaire Perlet »
- Il faut noter les différences d’interprétation avec la biographie de Jean Tulard qui pense que c’est à partir de cet événement que Napoléon s’est méfié de Fouché (NDLR)
- Comités anglais : groupes dirigés par Cadoudal et Hyde de Neuville responsables de plusieurs complots royaliste. Fouché règlera aussi rapidement l’enlèvement du sénateur Clément de Ris par les royalistes
- Même Napoléon croira à un complot de la gauche et s’exclamera devant Fouché : « Voilà l’œuvre des Jacobins ! »
- « Je dis au Premier consul lui-même, précise Fouché, qu’il venait de se déclarer le chef d’une monarchie viagère qui, selon moi, n’avait d’autres bases que son épée et ses victoires »
- Victoire éclatante de Bonaparte : sur 3.577.259 votants, il n’y eut que 8.374 ‘non’. Même en Vendée, on comte 17.019 oui contre 6 non.
- Joséphine sa dernière fille, naît un peu plus de neuf mois après sa disgrâce
- Le château de Fouché a été détruit par la suite et remplacé par un autre château construit en 1860
- Voir Jean-François Chiappe, Georges Cadoudal
- Article 1er : Le gouvernement est confié à un empereur. Article 2 : Napoléon Bonaparte, Premier consul actuel de la république, est empereur des Français. Article 3 : La dignité impériale est héréditaire.
- Voir André Castelot, Joséphine, Editions Perrin, 1965
- « Tôt ou tard, déclare-t-il à Bourienne, il faudra bien que l’Empereur prenne une femme qui fasse des enfants car, tant qu’il n’aura pas d’héritier direct, il y aura à craindre que sa mort ne soit le signal de dissolution ».
- Metternich dira à ce propos : « Aucun ministre n’ose faire ici ce que ne lui ordonne pas l’Empereur ; aucun d’eux surtout ne risquerait la récidive ».
- « Il ne faut pas se le dissimuler madame, l’avenir de la France est compromis par la privation d’un héritier de l’empereur » écrit-il.
- Emile Gabriel Daudet, La police et les chouans sous le Consulat et l’Empire
- Voir Emile Dard, Napoléon et Talleyrand
- Voir Girod de l’Ain, Bernadotte
- Commentaire de Napoléon : « Je ne vois que monsieur Fouché qui ait fait ce qu’il a pu et qui ait senti l’inconvénient de rester dans une inaction dangereuse et déshonorante. »
- Le comte Walewski, son fils naturel, fut ministre de Napoléon III et présida le Congrès de Paris en 1856
- C’est Fouché qui en cette occasion a prononcé la célèbre phrase : « C’est plus qu’un crime, c’est une faute ! » imputée à d’autres dont Talleyrand
- Élisa Bonaparte (Maria Anna) princesse de Lucques et de Piombino (1777-1820) Voir aussi Paul Marmottan, Fouché et la Grande duchesse Élisa
- « Sire, lui fait-il remarquer, je ne pense pas que celle-ci (l’armée) soit tellement heureuse qu’on puisse se battre à la fois sans danger au-delà des Pyrénées et au-delà du Niemen. »
- « Je suis bien à plaindre, écrit-il à son ami Thibaudeau, depuis que j’ai eu le malheur de perdre celle qui partageait toute ma vie : mon travail, mes lectures, mes promenades, mon repos, mon sommeil ; tout était en commun »
- Le général Malet, qui avait de la suite dans les idées, à défaut de jugeote, a fomenté trois complots de même nature contre Napoléon, dont le dernier en octobre 1812, a été le plus dangereux
- Voir Alain Decaux, La conspiration du général Malet
- « Ma mission n’était qu’un leurre, reconnaît Fouché, et envers moi qu’un prétexte pour m’éloigner » commentera Fouché
- Province aujourd’hui partagée entre l’Italie, l’Autriche et le nord de l’ex Yougoslavie
- Laibach, aujourd’hui Ljubljana capitale de la Slovénie
- Sur cette période, voir Robert Marguerit, Waterloo
- « Si les puissances s’obstinaient à ne pas faire la paix avec l’Empereur, si nous ne pouvions pas continuer la guerre, il faut tout prévoir, il y aurait de la folie à ne pas changer de manœuvre. »
- « Vous me trahissez, monsieur le duc d’Otrante, j’en ai la preuve » crie Napoléon en plein conseil
- « Que les chefs vendéens licencient leurs paysans et rentrent tranquillement chez eux » demande-t-il à leur chef le comte Malartic. « Je leur garantis toutes les sûretés ».
- Wellington lui avait dit « qu’il avait ordre de traiter sur l’unique base du rétablissement des Bourbons ». Et Metternich était du même avis.
- « N’étaient royalistes que ceux qui juraient pas Fouché ! » s’exclame madame de Chateaubriand dans ses Mémoires
- Dans une lettre adressée à Fouché, le comte d’Artois déclarait conserver une reconnaissance éternelle à celui qui avait sauvé monsieur de Vitrolles
- « Ah ! Mon malheureux frère, si vous me voyez, vous m’aurez pardonné ! » se lamentait Louis XVIII
- « Fouché en jouissait comme d’un triomphe, et moi j’étais un peu embarrassé », baron de Vitrolles, Mémoires
- Le , L’Indépendant publie cet encart : « Le roi a signé le contrat de mariage de monsieur le duc d’Otrante et de mademoiselle de Castellane, l’une des plus anciennes familles de Provence ».
- « Savez-vous monsieur de Vitrolles, que si le roi le veut, il peut très bien renvoyer le duc d’Otrante ? »
- Voir Emmanuel de Waresquiel, Le duc de Richelieu
- C’est Fouché lui-même qui leur donnera ce nom
- « Je suis habitué aux disgrâces, aux injustices, aux exils. Après avoir attaqué les passions, qui dominent aujourd’hui, je m’attendais à leurs vengeances. (Lettre au duc de Richelieu) Il écrira aussi à Metternich : « Je ne me plains ni ne m’étonne d’avoir été banni de France par ceux à qui j’ai tendu la main pour les y ramener ; je connais la faiblesse du cœur humain et je suis accoutumé aux caprices de la fortune ».
- Voir Antoine Thibaudeau, Lettres inédites
- « Je dois au moins vous informer que je suis aussi heureux qu’on peut l’être hors de sa patrie ». (Lettre à son amie la duchesse Delphine de Custine)
- « Il semble que ce soit la passion qui fasse marcher les hommes. Je vous l’ai dit et je vous le répète, les peuples n’obéissent qu’à ceux qui savent les subjuguer ». (Lettre de février 1820 à son amie la duchesse Delphine de Custine)
Joséphine 1965, prix du Plaisir de Lire | Bonaparte 1968 | Napoléon 1968 | Madame Royale 2008 | Talleyrand ou le cynisme 1980 |
<><> CJB Frachet - Fouché Castelot- Feyzin - 24/09/2009 - <><> •• © • cjb • © •• <><>
Joseph Fouché par Jean Tulard
Cette biographie de Joseph Fouché écrite par l'historien Jean Tulard, membre de l'Institut et directeur de l'institut Napoléon, apporte le regard d'un historien qui connaît particulièrement bien cette époque et apporte sa vision des relations entre Fouché et Bonaparte puis Napoléon.
Joseph Fouché, miniature sur ivoire, par Jean-Baptiste Sambat
1- Présentation de l'ouvrage
Si les livres sont nombreux qui font référence à Joseph Fouché et si de nombreux historiens se sont intéressés à lui, c'est bien sûr qu'il a connu un parcours singulier et une grande longévité à une époque particulièrement dangereuse pour les hommes politiques.
Il essaiera toujours de se rapprocher du pouvoir, pour « vouloir être de tout » comme le déclarera un jour Napoléon Ier. Cette soif de pouvoir lui jouera des tours par son comportement extrémiste pendant la Terreur à Nevers et à Lyon qu'il traînera toujours comme un boulet ou les deux disgrâces qu'il subira sous l'Empire comme ministre de la police.
Sa science de l'intrigue lui permettra souvent de revenir au premier plan, pendant les Cent-Jours [1] par exemple, il multiplia les manœuvres, devenant pour un temps le ministre de la police de Louis XVIII.
Dans cet ouvrage, Jean Tulard s'attache plus à présenter une histoire de la police entre 1793 et 1815 qu'à cerner la personnalité de Joseph Fouché.
L'homme Fouché
Joseph Fouché :
Le portrait que dressent de lui ses contemporains n'est pas flatteur : « Visage émacié, teint pâle, lèvres minces, paupières lourdes masquant un regard volontairement éteint, tel apparaît Joseph Fouché » (page 7). Son caractère est aussi présenté comme particulier : « Charles Nodier souligne son impassibilité et sa parfaite maîtrise [2] . » Pourtant un homme comme Balzac a dit beaucoup de bien de lui et s'en est largement inspiré, c'est par exemple Contenson le policier de Splendeurs et misères des courtisanes ou Fromenteau dans Les Comédiens sans le savoir. Il est aussi vrai que le mythe du grand policier retors s'en est mêlé. Napoléon dans Le Mémorial de Sainte-Hélène lui donne le rôle du traître et Victorien Sardou dans Madame sans gêne en fait une espèce de Scapin. (page14) [3]
De quoi largement brouiller une image qui était déjà difficile à cerner. [4]
L'historien Jean Tulard
2- Description des chapitres
21- De l'oratorien à l'ambassadeur
Joseph Fouché naît dans la commune du Pellerin à quelques lieues de Nantes le 21 mai 1759. En novembre 1781 à la fin de ses études, il entre à l'Oratoire de Paris. « Il était déjà tonsuré, ayant reçu les ordres mineurs. » [5] Entre 1780 et 1789 il professe à l'Oratoire avec de futurs conventionnels comme Billaud-Varennes, Lebon ou Daunou.
À Arras, Fouché se lie avec Robespierre qui lui présente sa sœur Charlotte avec qui il a une relation amoureuse sans suite. Fouché prête même de l'argent à Robespierre, nouvel élu aux États généraux. Ainsi serait née la rivalité entre les deux hommes, un contentieux datant de l'époque d'Arras. Revenu à Nantes, il préside le Club des Amis de la Constitution, se marie avec une jeune bourgeoise fort laide Bonne-Jeanne Coiquaud et finit par se faire élire à La Convention comme modéré, ce qui ne fut du goût de Robespierre. En ces premiers combats entre Girondins et Montagnards, Fouché penche pour ces derniers et prend une grave décision lourde de conséquences, qui le poursuivra toute sa vie : voter la mort du roi, devenir régicide. De l'épreuve de force engagée entre la Convention et la Commune, celle-ci en sort vainqueur, le régime se radicalise et Fouché aussi.
Le 24 juin 1793, il part en mission dans le centre et l'ouest où il joue un jeu de balance entre modération et radicalisme, mettent les riches à contribution et attaquant 'les superstitions religieuses' [6]. Mais c'est à Lyon qu'il va donner toute sa mesure, Lyon révoltée contre la Convention [7], Lyon où il arrive en novembre 1793 avec Collot d'Herbois. On estime à 1604 les victimes guillotinées ou mitraillées au canon pendant son passage à Lyon [8].
De retour à la Convention, Fouché constate la puissance de Robespierre... et les rangs clairsemés de l'Assemblée [9]. Après une pénible entrevue avec Robespierre [10], Fouché comprend qu'entre eux, c'est la guerre. Il va largement participer au complot qui va abattre Robespierre et ses amis le 9 thermidor an II (27 juillet 1794). Il sauve ainsi sa tête. Mais le Directoire le range parmi les Montagnards et il doit faire face à une violente attaque de Tallien. Il se garde bien de prendre part 'aux émeutes de la faim' [11] car écrit Jean Tulard, « il est un homme d'intrigue au sein du sérail, pas un émeutier. » (page 76)
Lors du complot royaliste du 13 vendémiaire, il est aux côtés de Barras et de Bonaparte qui écrase l'insurrection. Il n'en tira aucun profit immédiat, avait encore une fois sauvé sa tête mais se retrouvait sans ressources et allait vivre une des périodes les plus noires de sa vie. Cependant grâce à l'appui de Barras, il sera peu de temps ambassadeur à Milan puis en Hollande avant que le Directoire, toujours sur l'impulsion de Barras, ne le nomme ministre de la police [12]. C'est à ce poste qu'il va donner toute sa mesure.
22- Du directoire au Consulat
Comme l'écrit Jean Tulard « le choix de Fouché, en plein offensive jacobine, n'avait pas surpris, en raison de son passé. » (page 108) L'objectif assigné à Fouché est particulièrement difficile à atteindre : « Arrêter la Révolution, contenir les royalistes à droite, paralyser les jacobins à gauche. » C'est, par un jeu de balance qu'il connaît bien [13], ce qu'il va faire. La situation politique est tendue et Sieyès décide d'organiser un coup d'État en s'appuyant sur Bonaparte et Fouché : ce sera le 18 brumaire [14] dont Bonaparte tirera finalement tous les bénéfices. Pour Fouché, l'essentiel est atteint : il conserve son ministère sous le Consulat.
Il vise d'abord les Jacobins puis pourchasse les royalistes, procède à l'arrestation de deux de leurs chefs, Dupérou et le chevalier de Coigny, ainsi que le journaliste Joseph Fiévée [15] qui fut aussi un agent secret [16]. Bonaparte est aux anges, il lui écrit « ma confiance en vous est sans bornes. » [17] Mais la fausse nouvelle de la défaite de Marengo, où Fouché est prêt à abandonner Bonaparte pour s'allier avec Talleyrand et un obscure sénateur Clément de Ris [18] va ternir leurs relations.
Le Consulat met rapidement en place une réforme des structures policières et crée le poste de "Préfet de police de Paris" qui pourrait faire de l'ombre au ministre de la police qui va s'efforcer le conserver de leadership à Paris. Mais cette dualité est quand même synonyme de rivalité entre services de polices.
23- Grâces et disgrâce sous l'Empire
De toute façon, « la vie d'un ministre de la police n'était pas de tout repos sous le Consulat. Fouché s'efforce de dominer les événements, « les mesures de sûreté seront prises avant que vos ennemis puissent agir mais il faut se presser d'organiser nos forces. » [19]
À l'agitation jacobine succède l'attentat meurtrier de la rue Saint-Nicaise [20] est est immédiatement attribué aux Jacobins [21]. Le 24 décembre 1800, Bonaparte va voir un concert de Haydn à l'Opéra. La voiture du Premier consul était passée depuis peu quand une explosion ravagea une partie de cette petite rue [22]. Seul Fouché sait d'où vient le coup et parvient à démanteler le complot royaliste et arrêter bon nombre de conspirateurs. Grande victoire mais de courte durée. La guerre des polices fait rage entre lui et Dubois le préfet de police de Paris mais là encore, Fouché arrive à le prendre de vitesse pour dénoncer un nouveau complot. [23]
Fouché va s'opposer à Bonaparte en deux occasions importantes, d'abord pour éviter la signature du Concordat puis contre le Consulat à vie [24], ce que le Premier consul digère mal Aussi il profite de la paix d'Amiens signée le 25 mars 1802, pour supprimer le ministère de la police. Fouché se retrouve 'chômeur'. Disgrâce relative quand même : il devient sénateur et reçoit la sénatorerie d'Aix-en-Provence au revenu annuel de 25 000 francs.
Son retour en grâce, Fouché le doit à son initiative consistant devant le Sénat à demander à Bonaparte le 27 mars 1804 « d'achever son ouvrage en le rendant immortel. » Et le 2 décembre 1804, Fouché assiste au sacre de Napoléon dans la tenue réservée aux ministres pour les cérémonies. Dès son retour, Fouché réorganise et étend son ministère pour en faire une véritable machine de police politique, ayant maintenant sous ses ordres Réal [25], l'ex préfet de police Dubois et un ancien conventionnel modéré Pelet de la Lozère qui ne se fait guère d'illusions sur Fouché. [26]
Tous les matins, Fouché remet à Napoléon un compte-rendu regroupant les informations provenant des rapports de la gendarmerie et des préfets, des bulletins de la préfecture de police ainsi que de ses agents secrets [27]. La guerre des polices se rallume entre Dubois et Fouché, culminant dans l'affaire du complot du général Malet [28], que Fouché minimise et que Dubois monte en épingle [29]. Mais Napoléon se suit pas son ministre, plutôt contrarié par son attitude. [30]
1808 : Napoléon va se fourrer dans le guêpier espagnol. Fouché n'est pas chaud pour cette intervention, contrairement à Talleyrand [31] et il distille subtilement ses inquiétudes dans son bulletin quotidien remis à l'empereur. Quoi qu'il en soit, vu la tournure désastreuse des événements, ils sont très très inquiets et l'incroyable se produit : le 20 décembre 1808, ils tissent une alliance au cas où l'empereur ne reviendrait pas d'Espagne [32]. Aussitôt alerté, Napoléon revient à Paris à brides abattues. L'accueil est plutôt froid.
Napoléon sévit contre Talleyrand mais -pour le moment- ménage Fouché. Rapidement la guerre reprend avec l'Autriche et Cambacérès qui assure "l'interim", est vite dépassé et à compter du 29 juin 1809, c'est Fouché qui assume cette responsabilité. Dans ce rôle, il est parfait, réagissant avec vigueur, mobilisant la garde nationale pour endiguer un débarquement anglais dans le nord du pays. Récompense immédiate : Fouché est fait duc d'Otrante [33], petite localité des Pouilles en Italie. Mais il en fait trop [34], voulant tenter une paix avec l'Angleterre sans l'accord de Napoléon qui réagit violemment [35].
24- Déclin et fin de l'Empire
Fouché est destitué et se retrouve gouverneur des États romains. Survient alors un épisode assez rocambolesque où Fouché se joue de Savary son successeur, brûle et subtilise des documents importants qui lui sont réclamés et qu'il ne veut pas rendre. Napoléon ne peut le supporter et lui envoie Savary, le duc de Rovigo. Fouché prend la fuite en Italie pendant plusieurs semaines et finit par rejoindre sa sénatorerie d'Aix-en-Provence. De toute façon, selon Jean Tulard, Fouché n'était pas assez docile pour cautionner l'évolution de l'Empire en 1810 vers un régime autoritaire, rôle que Savary remplit pleinement. (page 255) [36]
Depuis sa disgrâce, Fouché mène une vie de riche rentier entre Aix-en-Provence et son château de Ferrières-en-Brie près de Paris dans la Seine-et-Marne. Le 10 octobre 1810, il a la douleur de perdre sa femme [37] qui l'a suivi dans toutes les grandeurs et les vicissitudes qu'il a connues mais il ne va pas tarder à se remarier avec une jeune et belle aristocrate qu'il rencontre lors d'un de ses séjours à Marseille Gabrielle-Ernestine de Castellane [38].
Il continue de suivre les affaires politiques de près et la déconfiture de Savary lors de la seconde conjuration du général Malet [39] en 1812, ne peut que le réjouir [40]. Ceci d'autant plus qu'à Paris, certains le regrettent.
Si Napoléon le rappelle pendant la campagne d'Autriche, juste après la victoire de Lützen le 2 mai 1813 [41] c'est qu'il le considère comme un homme dangereux pour lui et qu'il veut l'éloigner de Paris. Il va alors le 'promener', l'envoie à Prague puis le nomme gouverneur des Provinces Illyriennes [42] où Fouché fait en peu de temps un travail remarquable, jouant comme à son habitude des intérêts de chacun pour diriger et asseoir son autorité [43]. Mais la guerre reprend avec l'Autriche et il faut évacuer. Les Provinces Illyriennes n'existent plus. Fouché quitte sa capitale Laybach [44] et se replie sur Bologne dans le nord de l'Italie. Il sait que la France sera vaincue et que Napoléon est perdu. Comme solution de rechange, il pense à Murat le roi de Naples marié à sa sœur Caroline pour assumer le pouvoir. Mais Murat [45], après plusieurs tergiversations [46] ne pense qu'à sauver son Royaume de Naples et se rallie finalement à la coalition. IL en sera finalement déchu en mai 1815, après sa défaite à la bataille de Tolentino.
Fouché déplore « le peu de succès de sa mission » à Naples, tout en laissant agir Murat [47], « en virtuose du double jeu » [48] ajoute Jean Tulard. Il tente alors de joindre les maréchaux hostiles à l'empereur, Bernadotte puis Augereau le duc de Castiglione, à Lyon où il se rend [49] mais il est trop tard : lorsqu'il arrive à Paris, Talleyrand occupe déjà la place.
25- L'embellie des Cent-Jours
Talleyrand s'est débrouillé pour rester à Paris; c'est lui qui tient les cartes en mains [50]. Fouché se bat, prend des contacts avec un royaliste influent, le baron de Vitrolles [51]. Il intrigue auprès des royalistes pour récupérer le ministère de la police, essayant de leur démontrer qu'il est l'homme de la situation. Au mois d'août 1814, des nouvelles relations se nouent entre Fouché et Talleyrand qui dînent ensemble, « on m'assura, indique le comte Beugnot récemment nommé ministre de la police, que lorsque le duc d'Otrante est à Ferrières, sa correspondance avec Paris est fort active. » [52]
Le plus souvent à Ferrières, il y mène une vie apparemment retirée, dans cette propriété qu'il a peu à peu agrandie, entretenant maintes correspondances [53] En réalité, il est en relations avec Talleyrand alors à Vienne, avec Maret, le duc de Bassano et penche pour une régence avec l'impératrice Marie-Louise. Mais le retour de Bonaparte, « le vol de l'aigle de clocher en clocher » anéantit ses projets. Son idée est alors de se rallier à Bonaparte pour mieux le trahir [54] mais le roi, méfiant, préfère le mettre en arrestation. Suit un épisode curieux où Fouché parvient à berner les policiers venus l'arrêter en s'enfuyant de son domicile par une échelle. Peut-être se demande Jean Tulard, ceci ne fut qu'une mise en scène pour dédouaner Fouché avant le retour de l'empereur [55].
Bien qu'il eût préféré les Affaires étrangères, voilà de nouveau Fouché ministre de la police pendant les Cent-Jours. En subtil politique, il sait à quoi s'en tenir sur les chances de Napoléon, il pressent la défaite et l'exil, en décrit les étapes à Thibaudeau et au chancelier Pasquier [56]. Dans cette période particulièrement trouble, Fouché tisse sa toile et c'est Napoléon lui-même qui lui remet l'acte d'abdication en faveur de son fils. Il va alors mettre tout son talent à rétablir les Bourbons, « allez trouver le roi dit-il à Vitrolles, vous lui direz que nous travaillons pour son service. » [57]
Le 6 juillet 1815, en compagnie de Talleyrand, il dîne chez Wellington. La messe est dite. Quand Louis XVIII apparaît flanqué de Talleyrand et de Fouché, « le vice appuyé sur le bras du crime » [58], les royalistes sont ulcérés, mortifiés [59] et Joseph de Maistre aura cette remarque : « Il faut convenir que Sa Majesté Très Chrétienne figure tristement au milieu de ces deux acolytes. » [60]
26- La restauration et l'exil
Fouché est le point de mire des ultras qui veulent leur revanche pendant la Terreur blanche [61]. Il fait le grand écart entre l'établissement des listes de proscrits et l'aide à ses amis inscrits sur ces listes. Il croit avoir l'appui du roi contre les ultras et désire aussi par un mariage sceller son appartenance au nouveau régime.
Elle, Gabrielle-Ernestine de Castellane, est issue d'une branche de la maison de Provence, mais pauvre, lui est très riche et rêve de conforter sa position sociale : ils sont faits l'un pour l'autre. Pendant ce temps, les ultras réalisent un raz-de-marée aux élections à la chambre des députés, en profitent pour s'en prendre à Fouché et réclament son départ. Dès lors, ses jours sont comptés. Vitrolles a raconté cette séance mémorable où Talleyrand distille les allusions, de plus en plus précises, savourant ses effets. Mais Fouché avait compris depuis longtemps, son sort venait de se jouer [62]. Il est finalement nommé à Dresde en Saxe, ravale son orgueil et accepte son nouveau poste [63].
L'exil commence [64]. Il reste peu de temps à Dresde, les ultras ayant voté une loi qui exclut de l'amnistie les régicides. Fouché, révoqué, part à Prague où il espère bénéficier de la protection de Metternich mais vite fatigué de la ville après une rupture avec son ami Thibaudeau, il s'installe à Linz charmante petite bourgade autrichienne. Il en repart bientôt pour Trieste où il a résidé et qu'il a pu apprécier par le passé mais « c'est un homme brisé qui arrive à Trieste en novembre 1819. » [65] Il ne survivra que peu de temps à cette dernière épreuve.
3- Conclusion
Fouché, cet homme si décrié, qui passe encore aujourd'hui pour une espèce de Machiavel, peut-il être considéré comme un homme d'État ou comme un opportuniste, se demande Jean Tulard ? Lui qui porta l'estocade à Robespierre, sut résister à Napoléon, lui qui fit preuve d'une grande lucidité à des moments critiques [66], « a davantage profité des circonstances qu'il ne les a créées. »
Son mythe repose surtout sur un pouvoir nouveau pour l'époque, qu'il manie avec dextérité : la police politique. Avec lui, avec ses talents d'organisateur, il fait de cette police un redoutable instrument, une machine à renseignements qui déjoue les complots. « On pourrait, dit Jean Tulard, écrire l'histoire intérieure du Consulat et de l'Empire en n'utilisant que les bulletins quotidiens que Fouché adressait à Napoléon. »
« C'est un politique. La diplomatie le fascine » ajoute-t-il. Il rêva d'être ministre des Affaires étrangères, tenta de négocier avec les Anglais, ce qui lui valut d'être disgracié, mena les négociations en 1815 pour rétablir les Bourbons. Ce fut sans doute son grand regret. On lui reprocha toujours d'avoir été un régicide et le mitrailleur de Lyon [67]. Napoléon fera ce commentaire à Sainte-Hélène : « L'intrigue était aussi nécessaire à Fouché que la nourriture. » Il aime se singulariser, complote contre Robespierre le 9 thermidor [68], conseille Barras le 13 vendémiaire [69] et l'abandonne le 18 brumaire [70] au profit de Bonaparte.
4- La fortune de Fouché
Joseph Fouché passait pour être très riche et il est vrai qu'à la fin de sa vie, il se trouvait à la tête d'une belle fortune [71].
Ce ne fut pas toujours le cas. Au début du Directoire, il dut recourir aux bonnes grâces de Barras, tant il se trouvait dans le besoin [72] et même si l'on peut affirmer qu'il avait hérité de son père 2 000 livres de rente [73].
Comme ministre de la police en particulier, ses revenus ont variés selon sa situation :
- - 140 000 francs en 1806;
- - 250 000 francs e rente annuelle provenant de sa sénatorerie d'Aix-en-Provence;
- - 20 000 francs en 1808 provenant de dotations du Hanovre et de Westphalie;
- Il recevra ensuite chaque année 20 000 francs comme comte d'Empire, 60 000 francs comme duc d'Otrante et 5 000 francs comme Grand officier de la Légion d'honneur.
Il aime aussi jouer en bourse, recevant parfois des informations de première main : Jean Tulard cite l'exemple d'achat de la rente à 5 % qu'il fit quand il apprit avant tout le monde la victoire de Wagram en 1809.
Outre ses revenus financiers, Fouché avait acquis plusieurs biens immobiliers d'importance :
- - À Paris, son hôtel de la rue Cérutti ;
- - Le château de Ferrières-en-Brie en 1801 dont il agrandit largement le domaine au fil des années. Ses héritiers le revendirent en 1829 au baron James de Rothschild;
- - Le château de Grosbois en 1804, qu'il fut obligé de revendre à perte sur ordre de Napoléon, au maréchal Berthier [74].
Selon l'inventaire effectué post mortem, l'ensemble de ses biens valaient en 1821 près de 3 500 000 francs.
5- Joseph Fouché au cinéma
- L'aiglonne, de Keppens, en 1921 où Fouché est dépeint comme plutôt cruel;
- Madame Récamier de Ravel en 1927 où Edmond Van Daele « est un Fouché très convaincant » selon Jean Tulard;
- Les Cent-Jours en 1934 où Enzo Biliotti interprète un Fouché « très crédible physiquement et son rôle en 1815 bien mis en valeur » selon Jean Tulard;
- Madame Sans Gêne de Richbé en 1941 où Aimé Clariond est « un fabuleux Fouché » selon Jean Tulard;
- Le destin fabuleux de Désirée Clary de Sacha Guitry en 1941 où Noël Roquevert est « un Fouché inattendu » selon Jean Tulard;
- Madame Sans-Gêne de Christian-Jaque en 1961 où Renaud Mary est Fouché. Jean Tulard le qualifie de « film consternant »;
- Les duellistes de Ridley Scott en 1977, à partie d'une nouvelle de Joseph Conrad avec Albert Finney dans le rôle de Fouché;
- Le souper, d'Édouard Molinaro, en 1992, adapté de la pièce de Jean-Claude Brisville où Fouché est interprété par Claude Brasseur.
6- Bibliographie
- Parmi les nombreux ouvrages de Jean Tulard consacrés à la Révolution et à l'Empire, on peut citer :
- L'Anti-Napoléon, Julliard, 1964;
- La vie quotidienne des Français sous Napoléon, Hachette, 1978;
- La France de la Révolution et de l'Empire P.U.F, 1995.
- Louis Madelin, Fouché, Paris, 1901, 2 volumes, Éditions Plon, 1955
- Stefan Zweig, Joseph Fouché, biographie, traduit de l'Allemand par Alzir Hella et Olivier Bournac, Paris, 1931, 314 pages, Édition française Bernard Grasset, Le Livre de Poche historique n° 525-526, 1973 : Joseph Fouché (Zweig)
- André Castelot, Fouché, le double jeu, Librairie Perrin, 1990
- André Castelot, Joséphine, Librairie Perrin, 1965
- L'aiglon, Napoléon II, Librairie Perrin, prix Richelieu 1959
- Tallleyrand ou le cynisme, Librairie Perrin, 1980
- Alain Decaux, Face au mystérieux Fouché, revue Historia, 1975
- Le Gallo, Les Cent-Jours,
- Thierry Lentz, Le Grand Consulat, Fayard, Paris, 1999.
- A. E. Moulin, Le grand amour de Fouché : Ernestine de Castellane
7- Notes et références
- voir en particulier Emmanuel de Waresquiel, Cent Jours : la tentation de l'impossible, mars-juillet 1815, Fayard, 2008 (ISBN 978-2213621586)
- Charles Nodier, Souvenirs et portraits de la Révolution, 1840
- Pour l'homme et sa vie, voir Jean Savant, Tel fut Fouché, 1955, 331 pages
- Voir par exemple, Georges Riu, Essai psychopathologique sur Joseph Fouché, Bordeaux, 1933, 65 pages
- Louis Madelin Fouché, tome I page 5
- par exemple, l'arrêté sur les cultes qu'il promulgue à Nevers le 9 octobre 1793
- voir Soulèvement de Lyon contre la Convention nationale
- Voir Jean Étèvenaux Fouché, page 73, Bourg-en-Bresse, 1990, 208 pages
- C'est l'époque de la Grande Terreur où les Girondins et les hébertistes viennent d'être éliminés
- Voir les Mémoires de Barras, tome 1, page 178
- Émeutes à Paris du 12 germinal et du 1er prairial an IV
- Nomination datant du 2 thermidor de l'an VIII (juillet 1799)
- Sur cette période, voir Aulard, Paris sous le Consulat, tome I
- Voit Thierry Lentz, Le 18 brumaire, page 377
- Voir la biographie de Jean Tulard, Fiévée, page 110 pour cet épisode
- Josepf Fiévée, Correspondance et relations avec Bonaparte, 3 volumes, 1836
- Citation tirée Ernest D'Hauterive, La contre-police royaliste, page 196
- Sur cette affaire, voir Ernest D'Hauterive, L'enlèvement du sénateur Clément de Ris
- Lettre du 2 février 1800 de Fouché à Clarke
- À l'occasion de cet attentat, une liste des jacobins à proscrire fut dressée : voir Liste des Jacobins proscrits le 5 janvier 1801
- « Ce sont 'vos' terroristes qui ont fait le coup » reprocha Bonaparte à Fouché, Mio de Melito, Mémoires, tome I, page 332
- Voir Aulard Paris sous le Consulat, tome II, page 88
- Voir G. Augustin Thierry, Le complot des libelles
- voir aussi Consulat Bonaparte,Sieyès,Roger-Ducos ainsi que Consulat Napoléon Bonaparte
- Voir la biographie de Bigard Le comte Réal
- Pelet de la Lozère, Opinions sur Napoléon, page 81
- Voir les Mémoires de Fain, page 43
- 9 mars 1808 : découverte de la première conspiration du général Malet - pour la seconde en 1812, voir chapitre suivant
- D'Hauterive, La police secrète du premier Empire, pages 232 à 249
- Lecestre, Lettres inédites de Napoléon 1er, pages 205 à 219
- Voir les Mémoires du chancelier pasquier, tome I
- Cf les Mémoires du chancelier Pasquier, pages 353 à 357
- Par lettres patentes du 15 août 1809
- Voir les Mémoires du comte Mollien
- Voir Thiers, Histoire du Consulat et de l'Empire, tome XII
- Voir Thierry Lenz, Savary, page 54
- Pour un portrait de sa première femme, voir Stefan Zweig, Fouché
- Voir Moulin A. E., Le grand amour de Fouché : Ernestine de Castellane
- voir l'émission télévisée en 1963, La caméra explore le temps en 1963, La conspiration du général Malet
- Voir Alain Decaux, La Conspiration du général Mallet, Perrin, 1952
- voir Correspondance de Napoléon 1er, n° 19994
- Les Provinces Illyriennes correspondent grosso modo à ce qu'on appelait la Yougoslavie
- Voir Charles Nodier, Souvenirs de la Révolution et de l'Empire, tome II
- Actuellement Ljubljana, capitale de la Slovénie
- Voir le livre de Jean Tulard, Murat, page 187
- Murat va encore combattre à Dresde et à Leipzig avant de traiter avec l'anglais lord Bentinck pour sauver son royaume
- Louis Madelin, Fouché, page 202
- Voir André Castelot, Fouché, le double jeu, Librairie Perrin, 1990
- Voir les Mémoires de Chaptal, pages 312 à 315
- Voir André Castelot, Talleyrand ou le cynisme, Librairie Perrin, 1980
- Voir Eugène Forgues, Mémoires et relations politiques du baron de Vitrolles - Tomes I 1814, II 1814-1815, III 1845-1830
- Eugène Welvert, Napoléon et la police sous la première Restauration, page 67
- Voir Thibaudeau, Mémoires, pages 425-427
- Louis Madelin, Fouché, tome II, page 332
- Thibaudeau, Mémoires, page 457
- Voir les Mémoires de Thibaudeau, page 483 et ceux de Pasquier, tome III
- Vitrolles, Mémoires, Éditions Farel, tome II, page 191
- Chateaubriand, les Mémoires d'outre tombe, Éditions Levaillant, 1948, réédition Éditions Clément, 1997
- Beugnot, Mémoires, page 605, qui fut témoin de la scène en compagnie de Chateaubriand
- Lacour-Gayet, Talleyrand, tome III, page 23
- Voir par exemple Henri Houssaye, La Terreur blanche
- Vitrolles, Mémoires, tome II, page271-279
- Eugène Forgues, Le dossier secret de Fouché, juillet-septembre 1815, 82 pages
- Voir Julien Sapori L'exil et la mort de Joseph Fouché, Anovi, 2007
- Jean Tulard, Un ministre de la police en exil, revue de l'Institut Napoléon, 1962
- par exemple, quand il met en garde Napoléon sur les dangers de s'engager en Espagne (1808) ou en Russie (1812), ou quand sa vive réaction met en échec les Anglais lors des Cent-Jours
- Voir par exemple Alain Texier, La terreur institutionalisée, Historia no 624, décembre 1998
- Voir A. Savine et F. Bournand F, Le 9 Thermidor, Éditions Michaud
- Voir A. Keller, De Brienne au 13 vendémiaire, Éditions Mericant ou le film-documentaire de Maurice Failevic, Saint-Roch : le 13 vendémiaire an IV, 1969
- Voir Jean-Paul Bertaud, Bonaparte prend le pouvoir, Complexe, Bruxelles, 1987
- Voir l'inventaire de ses biens réalisé après son décès le 18 mai 1821, Archives nationales, étude XCI, liasse 1613
- Voir Stefan Zweig, Joseph Fouché
- Voir Henri Buisson, Fouché, page 399
- Voir les Mémoires de Paul Barras, tome IV
Grand Prix Gobert de l'Académie française 1971 | Grand Prix national de l'Histoire 1977 | Prix du Mémorial 1981 | Prix des Ambassadeurs 2007 | Lauréat de l'Académie des beaux-arts et Prix Marmottan, |
<><><> CJB Frachet - Fouché Tulard - Feyzin - 24/09/2009 - <><> •• © • cjb • © •• <><><>
Colette Laussac et l'histoire locale
Terroir et histoire locale
Colette Laussac est juriste, historienne de l'art et romancière. Longtemps partagée entre Toulouse où elle était enseignante et la basse Corrèze, elle est finalement retournée vivre dans son village natal de Branceilles aux confins du Lot et de la Corrèze.
Elle est membre de l'École de Brive. [1] C'est également un sculpteur de talent qui utilise essentiellement une pierre locale d'une blancheur lumineuse, la pierre de Carennac.
Œuvres
- Verre de gris, Milan, 1988, 166 pages, les relations difficiles entre une fille et son père alcoolique
- Une mère silencieuse, Renaudot, Collection "Parler vrai", 1990, 125 pages, ISBN 2877420612
- Le sorcier des truffes, Seghers, Collection Mémoire Vive, 1992, réédition Le Grand livre du mois, 1992 et J'ai Lu en 1994, l'histoire d'un jeune paysan pauvre né à Branceilles, petit village de Corrèze, qui deviendra un spécialiste de la truffe, "le sorcier des truffes"
- Secrets de famille, La Table Ronde, 1994
- Le dernier bûcher, Robert Laffont, février 1995, 251 pages, (ISBN 2-221-07998-1), réédition Pocket, novembre 1998, les mésaventures de Guillaume Fort au temps de l'inquisition et des Cathares
La falaise qui chante, Vie et mort d'Ambakané, initié dogon, Robert Laffont, 1996, réédition Seghers, 1999, 240 pages, ISBN 223212164X, un jeune malien confronté aux rites initiatiques...
- À la Saint-Martin , Robert Laffont, 1998, réédité chez Pocket en août 2003, 211 pages, l'histoire de Flavien, adolescent de treize ans en 1913 qui travaille comme journalier dans le village de Saint-Martin, entre Lot et Corrèze
- Une nuit trop blanche, La Table Ronde, février 2000, 154 pages, ISBN 271030942, une femme prise prise entre deux hommes, un ami et son mari qui la délaisse
- L'Épée de Rocamadour, et autres histoires mystérieuses, Le Rocher, collection Mystères Des Provinces, janvier 2001, 267 pages, balade dans la région Midi-Pyrénées
- Le don en héritage, Robert Laffont, 2001, rééditions France Loisirs en janvier 2001 et éditions de La Seine, Succès du livre, août 2004, 191 pages, la transmission d'un don mystérieux, celui de guérir...
- La promesse des jours, Robert Laffont, 2002, ISBN 2221097394, réédition Pocket, juillet 2005, 222 pages, Gilbert ne parvient pas à se réadapter après son retour d'Algérie. Heureusement, il va découvrir le Causse une belle maison à retaper dans le Lot et sa vie va pouvoir repartir...
- Le ciel de Collonges, Robert Laffont, mai 2003, 263 pages, ISBN 2-221-09995-8, de De Toulouse la rose où son mari est assassiné à Collonges la rouge, son village où elle va reprendre goût à la vie...
- Le vent d'Espagne, Robert Laffont, 18 octobre 2005, 346 pages, ISBN 2-221-10512-5, voyage initiatique de deux adolescents dans l’Espagne de l’Âge d’or.
- Le souffle des alizés, Robert Laffont, octobre 2006, 326 pages, isbn ISBN 2-221-10664-4, suite du précédent et des aventures de ses héros dans le Nouveau Monde
- Colette Laussac et Olivier Meunier, Découverte du Midi-Corrézien. Canton de Meyssac, Éditions du Ver Luisant, 2007.
Notes et références
[1] ↑ Ecole de Brive
<><><> CJB Frachet - Feyzin - août 2011 - <><> •••• © • cjb • © •••• <><><>
L'historien Lucien Febvre
Portrait de Lucien Febvre
Si Lucien Paul Victor Febvre est né à Nancy (Meurthe-et-Moselle) le 22 juillet 1878, c'est en fait un franc-comtois, lorrain d'adoption, mais comtois passionné : « Nous ne sommes point, Comtois, des conformistes. Courbet ne l'était guère [...] ni Pasteur [...] ni Proudhon. » [1]
Il mourut le 26 septembre 1956 dans sa chère propriété du Souget située dans la cité de Saint-Amour, un bourg important du sud du Jura, où la Franche-Comté rejoint la Bresse et le Revermont. On le trouvait souvent le sécateur à la main, taillant et élégant avant de regagner son bureau.
Dans son bureau
Il est considéré comme le plus important historien français de sa génération, fondant avec Marc Bloch l'école des Annales [2] qui eut un grand retentissement et renouvelant profondément l'approche historique. C'est selon Fernand Braudel, « le plus grand historien du XXe siècle ».
Très tôt, il se passionne pour l'histoire, intègre I'ENS en 1899, dans la section des lettres et soutient sa thèse en 1911 sur Philippe II et la Franche Comté [3] où il fait ressortir les interactions existant entre l'économie, la société et les représentations mentales, façon narratrice d'aborder l'étude de l'histoire.
Saint-Amour : vues de l'église, La Chevallerie et le passage couvert des Saintes-Marie
En 1911, Lucien Febvre est nommé professeur d’histoire au lycée Victor Hugo à Besançon. Il est remarqué pour ses recherches et ses qualités pédagogiques mais il n'obtiendra pas la chaire d’histoire moderne à la faculté des lettres malgré de nombreux soutiens. Le ministre n’accèdera pas à cette requête et il rejoindra finalement la faculté de Dijon, quittant à contrecoeur la Franche-Comté. [4] Il faut noter que Lucien Febvre est alors connu comme militant socialiste à Besançon entre 1907 et 1912, [5] écrivant une trentaine d'article dans l'hebdomadaire Le Socialiste Comtois, très hostile aux radicaux et à Clemenceau et appelant de ses voeux une révolution politique et sociale.
Après la Première guerre mondiale et un passage par l'Université de Strasbourg en 1919, il choisit de s'orienter vers la recherche et rejoint alors le collège de France et à l'école pratique des hautes études. Cet encyclopédiste et humaniste effacé forma une génération "d'historiens-sociologues" qui imprimèrent une nouvelle direction à l'historiographie, siégea aussi au Conseil supérieur de l'éducation national et au Directoire du centre national de la recherche scientifique.
Lucien Febvre, militant
Notes et références
[1] Cité dans l'article "Lucien Febvre", Encyclopédie Universalis
[2] École qui partait du principe d'abattre "les cloisons" entre géographes, économistes, sociologues et historiens.
[3] véritable préfiguration de la thèse de Fernand Braudel sur la Méditerranée et le monde méditerranéen sous Philippe II
[4] « Quelle occasion manquée pour la Franche-Comté ! » regrette Joseph Pinard, ancien député, agrégé d’histoire et auteur d’une biographie de Lucien Febvre
[5] Voir le livre de Joseph Pinard, "militant socialiste à Besançon entre 1907 et 1912", éditions Cêtre, 328 pages, août 2011, ISBN 2-8782-3235-6
Bibliographie
MŒLLER B., Bibliographie des travaux de Lucien Febvre, (1989), Paris, EHESS, 1995 - Lucien Febvre, Lecteur et critique, Paris, Albin Michel, 2003 - «Lucien Febvre et l'Encyclopédie française», Jean Jaurès, Cahiers trimestriels, 2002, n°163-1
- Giuliana Gemelli, « Lucien Febvre et la représentation de l’État contemporain. Le tome X de l’Encyclopédie française », Société d’études jaurésiennes, Cahiers Jaurès, 2002/1-2 - N° 163-164, ISSN 1268-5399, pages 97 à 116
- Hans Dieter Mann, Lucien Febvre la pensée vivante d'un historien, Cahiers des Annales 31, édition EHESS - Armand Colin, Paris, 1971, 189 pages
- Bertrand Muller, Lucien Febvre, lecteur et critique, Paris, Albin Michel, 2003
- Lucien Febvre : Eléments bibliographiques
- Lucien Febvre par Gabriel Le Bras Lucien Febvre et mme Paule Braudel
Saint-Amour, vue de l'apothicairerie et façade du collège Lucien Febvre
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